Analyse d'un extrait d'aimé césaire

Littératures francophones.
Commentaires sur un extrait du Cahier d’un retour au pays natal (A. Césaire).

§1 [Tourte… je vous hais]
Il semblerait que Césaire procède ici à un parallélisme avec le poème Zone d’Apollinaire (issu du recueil Alcools). Mais si Apollinaire fait dans son poème l’éloge de la modernité, Césaire quant à lui la voit comme une chose négative : « L’air se rouille »,« allégresse mauvaise », « l’eau sanieuse » et enfin « je vous hais ».
NB : « ô tourte » n’ayant a priori aucun rapport avec la suite supposerait un jeu sur l’homonymie avec le « ô tour » de Apollinaire.

Vocabulaire : sanieux : qui contient de la sanie ou y ressemble.
<sanie : matière purulente, fétide, mélangée de sang.
§2 [on voit encore…ASSEZ DE CE SCANDALE !]
Cette strophe contrasteavec la précédente. Si le premier paragraphe laissait entrevoir des images modernes et négatives, le second évoque les Antilles (le madras, les anneaux que l’on appelle également « des créoles »,…) de façon simple, sympathique. Il évoque des femmes souriantes, nourrissant leurs enfants au sein.
Pourtant à la fin, il s’écrie «  ASSEZ DE CE SCANDALE ». Ce n’est plus la voix de Césaire à cetinstant, qui ne voit probablement rien de scandaleux à cette image. C’est la voix de l’occident qui s’indigne de voir ces femmes ayant les seins à l’air libre.

Vocabulaire : madras : étoffe de soie et coton de couleurs vives très prisée par les Antillaises.
§3 [Alors voilà…de fièvres jaunes !]
La fin de ce paragraphe finit par l’évocation de trois couleurs, associées à trois images :
- Lunesrousses. C’est une image négative puisqu’on appelle « lune rousse » la lunaison d’après Pâques, période où il y a un risque de gelées qui font roussir les jeunes pousses. Cela donne l’idée d’une jeune plante condamnée à peine sortie de terre, un renouveau tué dans l’œuf.
- Feux verts. Cela peut évoquer les feux de signalisations occidentaux et donc rappeler le §1 où Césaire critiquait lamodernité.
- Fièvres jaunes.
Il s’agit d’une « dérive nostalgique ». Cela évoque la passivité d’un peuple qui regrette le passé mais se laisse tranquillement emporter par le courant occidental.
NB : le terme «  sataniques » peut renvoyer à un passage antérieur à l’extrait étudié à savoir celui où il semblait réciter des incantations sorcières (« voum rooh oh, voum rooh oh »).
§4 [Envain…marmonneurs de mots] et §5 [Des mots?… flambées de villes]
Les occidentaux considèrent les Antillais comme de simples « marmonneurs de mots », mais Césaire n’est pas d’accord (« en vain », « pauvre consolation »).
Le terme est repris bien plus tard par Gabriel Maximin qui déclare : « les mots ne sont pas du vent ». Pour lui, les Antillais ne sont pas seulement « d’impénitents marmonneurs de mots ».Césaire comme Maximin ont conscience de la force de mots mais dans des perspectives très différentes. Césaire les voit comme une force destructrice, irritante (« érésipèles ») qui décime comme une maladie, qui rase tout ; il en tient un discours très violent. Maximin quant à lui les évoque comme étant «  des feuilles envolées au risque de leurs racines, vers les récoltes camouflées au fond du silenceet de la mer. », perspective beaucoup plus légère, pacifique.
Vocabulaire : érésipèle : infection de la peau, caractérisée par une plaque rouge douloureuse et de la fièvre.
§6 [Sachez-le bien…Grand Peur]
L’an mil et la Grand Peur évoquent un « mythe du XVIe siècle (…) avant d’être repris par les historiens romantiques du XIXe siècle(…). Il s’agissait d’expliquer que les chrétiens occidentauxétaient terrifiés par le passage de l’an mil suite auquel Satan pourrait surgir de l’Abîme et provoquer la fin du monde »
On peut y voir un parallèle avec un passage antérieur à l’extrait étudier : « Commencer quoi ? La seule chose qu’il vaille la peine de commencer : La Fin du monde parbleu. ».
§7 [Accommodez-vous de moi. Je ne m’accommode pas de vous !]
Lilyan Kesteloot y voit une...