La Machine Du Temps. Méditation Sur La Métaphore Dans Le
discours de l’Histoire de la langue
ELENA LLAMAS POMBO
Universidad de Salamanca
(Artículo publicado en: TIEMPO: TEXTO E IMAGEN. TEMPS : TEXTE ET IMAGE
Actas del XIX Coloquio de la Asociación de Profesores de Francés de la Universidad Española (APFUE)
José Manuel Losada Goya, ed.
Universidad Complutense de Madrid, 2011, pp.169-178)
Les éditeurs de cet ouvrage collectif nous ont proposé une étude d’ensemble
sur le temps dans les textes, ainsi que sur l’image du temps et les contraintes de sa
représentation. La perspective linguistique ne sera pas dénuée de sens dans cette
réflexion commune car, s’il y a un domaine des sciences du langage où le facteur temps demeure crucial, c’est bien celui de la linguistique historique et de l’histoire
de la langue, un facteur qui intéresse également la philosophie du langage.
L’action du facteur temps dans la langue est un objet d’étude qui se trouve à la
base du corps théorique sur lequel est basée la linguistique, dès sa constitution en
tant que science. Alors, comment cette science a‐t‐elle exprimé les notions temporelles ? L’analyse historique des langues a très tôt incorporé des séries de
métaphores destinées à conceptualiser l’action du temps dans la langue et son
évolution dans la société, métaphores qui feront l’objet d’une méditation dans cet
article (1).
1. LA MÉTAPHORE DANS LE LANGAGE SCIENTIFIQUE
L’épistémologie et la philosophie se sont parfois méfiées de la métaphore :
« l’esprit scientifique doit‐il sans cesse lutter contre les images, contre les
analogies, contre les métaphores » a écrit Gaston Bachelard (1934 [1973] : 38). Il
en est ainsi parce que la connaissance scientifique contemporaine exprimée à
travers la parole tend à accomplir trois caractéristiques idéales : précision, neutralité (ou absence de connotations subjectives) et concision (ou économie)
(Gutiérrez Rodilla, 1998 : 30‐37 ; 2005 : 22‐25).
1 Cet article est écrit conformément aux Rectifications de l’orthographe recommandées par l’Académie
Française (Journal Officiel de la République Française, 06/12/1990).
| 169 Néanmoins, nul ne doute actuellement que la métaphore occupe une place
fondamentale dans l’étude du langage scientifique. Son emprise sur la science
s’explique par le fait que cette figure constitue un outil puissant de
conceptualisation et de dénomination, et non seulement un simple effet de style. Comme principe constitutif de la pensée et du langage scientifiques, la métaphore
intéresse ainsi la lexicologie et la terminologie, mais également l’histoire de la
science, les sciences cognitives et la philosophie du langage.
La métaphore a notamment bénéficié d’un nouveau statut grâce aux sciences
cognitives, car elles ont montré que celle‐ci constitue un élément essentiel de la pensée et de l’expérience du monde, et non seulement une façon de s’exprimer ou
un ornement rhétorique. Pour les cogniticiens, elle est avant tout un outil
paradigmatique qui oriente la pensée, une ressource cognitive permanente. En
particulier, le réexamen entrepris par Lakoff et Johnson (1980) nous a démontré
que notre langage, dans son usage le plus quotidien, est traversé para la métaphore
et qu’une partie de notre système conceptuel est structuré métaphoriquement
(c’est‐à‐dire que la plupart des concepts sont en partie compris en termes d’autres
concepts).
Le raisonnement et le langage métaphoriques sont en effet partout présents
dans notre perception du monde. Par exemple : nous nous représentons l’esprit
humain comme un ...
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