Compte Rendu De L'Article De Gary B. Nash « The Hidden History Of Mestizo America »

Compte rendu de l'article de Gary B. Nash
« The Hidden History of Mestizo America »

La vision dichotomique de la société américaine est une construction idéologique issue d’une élite qu'il faut comprendre à la lumière de la construction de la nation américaine. Si, de nos jours, dans les faits comme dans les représentations les Etats-Unis deviennent une nation métisse, le paradigme de la racecontinue à structurer les relations sociales. Gary B. Nash insiste sur la nécessité de dépasser ce paradigme en construisant socialement et intellectuellement la conception d'une Amérique métisse.

Dans les XVIIe et XVIIIe siècles, les mélanges de populations n'étaient pas perçus comme un problème. L'article ouvre sur l'exemple du mariage entre Pocahontas et John Rolfe à la fin des années 1610:ce qui choque les contemporains c'est plutôt l'alliance d'une fille de roi et d'un aventurier. Ce premier mariage aurait pu être le début d'un pays métis. Cependant, les guerres et les violences entre colons et indiens rendent les liaisons rares, mais, légalement (à part en Caroline du Nord) les mariages mixtes ne sont pas interdits et ont même été encouragés par des homes politiques essentielsà la construction de la nation américaine, à l'instar de Jefferson.

Cette construction s'est pourtant érigée à long terme sur les bases d'une conception raciale de la société développé par une élite d'ascendance européenne qui pensait le mélange des populations comme une source de corruption. L'évolution de la définition légale du Noir en Virginie nous offre un exemple de l'édification de cetteidéologie. En 1785, dans les années suivant la Révolution, est Noir celui qui a au moins un quart de sang noir; au début du XXe siècle au moins un seizième, et en 1930, une goutte. Ces définitions légales sont motivées par des préjugés qui sont presque des croyances sur le sang et son rôle dans la transmission des caractères et de la culture, en même temps qu'elles les propagent.
Pour comprendrecette division de la société américaine en Blancs et Noirs au niveau des représentations, il faut en chercher les origines et l’évolution. Il est à ce sujet éclairant de comparer les cadres économiques et démographique de la colonisation de l'Amérique anglaise et de l'Amérique espagnole.

La colonisation espagnole s'est faite plus tôt, et donc aussi l'importation d'esclaves noirs. Les colonsétaient suffisamment nombreux pour soumettre les Indiens, qui en deviennent les sujets. De plus, la majorité des colons sont des hommes venus seuls, qui se mélangent donc aux populations noires et indiennes. L'auteur soutien que le long contact méditerranéen prédisposait aussi les Espagnols au métissage. Les tableaux de castes nous offrent un panorama du métissage en Nouvelle Espagne. Ils montrentnotamment la volonté de la société mexicaine du XVIIIe de dépeindre sa richesse et sa complexité pour l'Europe. Les séries et la précision affichée des appellations de chaque type de mélange laissent voir à la fois l'ampleur du phénomène de métissage et donc son acceptation, comme aussi l'importance accordée aux différences raciales dans la hiérarchisation de la société coloniale.

Les conditionsdémographiques et économiques de la colonisation anglaise ont pour conséquence une toute autre appréhension du phénomène par les contemporains. Les colons arrivaient mariés ou avaient un accès plus facile aux femmes européennes, alors qu'ils n'avaient pas les moyens d'assujettir les populations indiennes. Le mélange avec les esclaves noires était courant dans les faits, mais les mariages mixtesétaient inconcevables. Ces conditions sont en partie à l'origine de la conception binaire des races qui prévaut encore aux Etats-Unis.

Sa construction idéologique véhiculée par les lois et les institutions se fait pourtant dans les premières décennies du XXe siècle. Alors que les classes moyennes et hautes se retirent dans les suburbs, se développe tout un mouvement eugéniste porté par les...