Ionesco et le rire

ARTC-B410
 « Lecture Philosophique de textes Théâtraux »

Professeur : Meyer, Michel

MA 1 - Arts du Spectacle Vivant - Erasmus Mundus

Université Libre de Bruxelles – 2011/2012

Roberta de Mello Casa Nova

Matricule ULB : 000355261





Ionesco et le rire



" J'aurais voulu remplir le vide avec de l'être."
Victimes du devoir, Ionesco









IntroductionCe travail portera sur les spécificités du style d’Eugène Ionesco par rapport à son côté comique et burlesque, même s’il mettra en lumière les nuances du rire créées par cet auteur.
Pour parvenir à distinguer de tels éléments notre point de départ sera l’étude portant sur les caractéristiques littéraires et humaines qui provoquent le rire, transmises dans le livre Le comique et le tragique deMichel Meyer.
Ensuite, nous allons souligner parmi les éléments trouvés et décrits par Meyer, les différences et similitudes contenues dans l’œuvre de Ionesco.

L’énigme du rire

Selon Meyer, le rire est le propre de l’homme, un acte intellectuel qui nous démarque de l’animal et du biologique. Ainsi, comprendre les éléments et situations qui provoquent le rire et les motifs pour lesquelsune scène ou un spectacle est classifié en tant que comédie ou même en tant que comique, burlesque ou clownesque non seulement constitue une partie indispensable de l’apprentissage du comédien, mais aussi, nous conduit à une compréhension plus profonde des mécanismes culturels et sociaux développés par l’être humain.
Le processus de civilisation, dans lequel l’homme a réussi à domestiquer sesfonctions naturelles et tous les plaisirs du corps tels que : « Manger, boire, dormir, se reproduire, éliminer les toxines, tout est socialisé et civilisé par l’homme. » [1]a pour but d’effacer tout ce qui nous rappelle notre animalité. Dans cette idée de civilisation, de bienséance, de progrès et de vérité absolue, nous pouvons localiser de riches « nourritures » pour la moquerie, le grotesque,la satire, la dérision.
A propos de cette idée, rappelons la définition de Baudelaire sur le rire: « Il le voyait comme l’empreinte du diable. Le diable est toujours celui qui démystifie et démasque celui qui affirme savoir. Il est le savoir donc l’ennemi de la croyance. Ne s’apparente-t-il pas au fou et au bouffon ? » [2]
Ionesco a été nommé « le triste clown »[3] (dans lescorrespondances avec Jean Louis Barralt), « le clown blanc » par Vuarnet, (notes de pages) mais la caractéristique bouffonesque est la plus récurrente. Il dénonce les maladies de la société en révélant une vérité cachée, ainsi que la petitesse de notre existence, à travers une stratégie très sophistiquée, régie par les jeux de mots et des situations absurdes et ridicules. Dans l’entretien réalisé parGabriel Liiceanu, Ionesco s’exprime sur la condition humaine et révèle des réflexions propres à un bouffon :
«  Nous naissons, nous croissons en force et en beauté et petit à petit, c’est la dégringolade, et nous voilà boiteux, laids, fragiles ; comment cela est-il possible, comment cela est-il permis et pourquoi ? J’ai interrogé tous les prêtres que j’ai rencontrés et même le Pape à qui j’aiécrit (…) Tous m’ont répondu : c’est un mystère, nous n’avons pas de réponse (…) Je vois là une cruauté de Dieu que moi, homme, je ne peux pas accepter. »[4]


Le rire est provoqué par une identification du spectateur au personnage comique, mais cette identification n’est pas de l’ordre de la catharsis, au contraire, elle est mise à distance, c’est la prise de conscience de la différencequi incite au rire. Il doit rappeler la distance que nous devons garder avec notre propre image. L’exemple qui consiste à voir une personne qui chute, me pousse à rire dans la mesure où je pourrais être à sa place, être celui qui fait la chute, mais cela je l’oublie dans le rire et grâce à lui.
Bergson a développé le concept de façon plus pragmatique:


« le rire repose sur...