l'Amérique Latine Et l'Europe Au Xixème Siècle

L’usage du terme « Amérique latine » pour se référer à l’ensemble des pays américains de langue latine (espagnol, portugais et français) est dû aux visées coloniales de Napoléon III dans les années 1860. Pour cacher son intérêt géopolitique pour l’Amérique latine, il affirme vouloir défendre ces pays latins culturellement proches de la France des pays anglo-saxons, d’où le besoin de faire unedistinction entre les deux Amériques. Dès la fin du XVIIIème siècle, l’Amérique latine assiste à quelques contestations du pouvoir colonial, comme nous l’indique l’insurrection indigène au Pérou menée par Tupac Amaru II contre les colons espagnols en 1780. Cette volonté de se séparer des puissances ibériques s’accentue au long du XIXème siècle, le « siècle de l’Europe ». L’Europe qui commence leXIXème siècle en pleine guerre napoléonienne et, à l’issue de cette dernière, met en place une nouvelle hiérarchie géopolitique lors du congrès de Vienne en 1815, ce qui favorise une stabilité politique permettant son développement socio-économique et ainsi son affirmation comme grande puissance du siècle. Son rayonnement atteindra bien évidemment le Nouveau Monde en raison d’une forte présencecolonisatrice qui date du XVIème siècle et lui assure des liens culturels très forts, et c’est pourquoi nous nous demandons quelle influence l’Europe a exercé sur l’Amérique latine tout au long du XIXème siècle.

I- Une participation européenne décisive aux processus d’indépendance (1810-1830)
a- Idéologiquement : les idées des Lumières influencent les élites « créoles »
Fruit des travaux desphilosophes comme Voltaire, Rousseau, Diderot ou autres D’Alembert, la philosophie des Lumières, répandue au XVIIIème siècle et basée sur les principes de liberté et de raison éclairée, jouera un rôle clé dans la lutte pour l’indépendance des pays latino-américains. Ayant déjà influencé des leadeurs comme Thomas Jefferson aux Etats-Unis et Robespierre en France à la fin du XVIIIème, les idées desLumières vont guider des révolutionnaires latino-américains comme le Vénézuélien Simon Bolivar ou l’Argentin José de San Martin. Disciple de Rousseau et ancien étudiant à l’Ecole Normale Supérieur, Bolivar, qui a une éducation européenne, rentre au Venezuela en 1807 pour organiser le mouvement indépendantiste.
Statues de Simon Bolivar et José de San Martin à Guayaquil, Equateur
Lors ducouronnement de Napoléon Ier, Bolivar comprend que la puissance des idéaux des Lumières mènera la France à la gloire et que l’Espagne ne pourra pas faire face aux troupes d’outre-Pyrénées. C’est pourquoi il pense que l’Amérique hispanique doit se séparer de Madrid pour ne pas subir une domination franco-britannique.
b- Militairement
L’invasion de l’Espagne par la France de Napoléon Ier en 1808, quise traduit par une guerre qui dure jusqu’en 1814 a favorisé les colonies hispano-américaines, qui profitent de la guerre pour lancer une première tentative d’émancipation en 1816. Cependant, l’Espagne arrive dans un premier temps à écraser les rebelles. A ce moment, seule l’Argentine de San Martin demeure indépendante. La menace napoléonienne pèse aussi sur le Portugal, dont le roi Jean VI décidede quitter Lisbonne et s’installer à Rio de Janeiro, ce qui favorise l’indépendance du Brésil en 1822 puisqu’une partie de la cour adhère aux revendications de l’intelligentsia brésilienne.
Si la première tentative d’émancipation a échoué, une deuxième qui aura lieu au début des années 1820 scellera l’indépendance des colonies. Mieux organisée, cette nouvelle vague indépendantiste est soutenuenon seulement par l’élite créole mais aussi par les populations marginalisées comme les Indiens, les Métis et les Noirs. L’appui militaire britannique y est très important, la Grande-Bretagne fournissant des armes et des bateaux aux révolutionnaires. La défaite espagnole est symbolisée par la rencontre à Ayacucho, au Pérou en 1824, entre les troupes de Bolivar, venue du Nord, et celles de San...